And the devil is blind...[18/02/2007] (avec Arcade)

L'après-midi touche lentement à sa fin. Le disque lumineux du soleil poursuit sa chute vers l'occident, teintant le cile de rouge et d'orange, brunissant les nuages. Il n'y a pas de vent, mais il ne fait pas chaud non plus. Tout forme un cadre idéal pour la rigidité de la rencontre courtoise, mais néanmoins officielle, que s'apprête à faire Matt Murdock.
Le procureur, aux cheveux châtains courts et un peu ambrés par le soleil, arbore un complet bleu-gris, et ses habituelles lunettes rondes aux verres rouge sombre. Il s'appuie sur sa canne de bois blanc, bien plus sûr et plus confiant que ce que pourrait être un homme aveugle aux yeux de l'humanité.
La sinistre grille d'entrée du manoir lui barre la route. Il fait alors une pause, et se concentre pour tirer le plus d'éléments possbiles du décor qu'il ne peut apercevoir.

*Vu l'emplacement, le manoir doit être très certainement ancien. Mais les fenêtres ne sont pas d'époque ; le vitrage est insonorisé. On ne tient pas à ce que ce qui se passe à l'intérieur soit su. Voilà pour un premier mauvais signe...*

Il peut entendre également le vrombissement discret d'une caméra au-dessus de sa tête. La batterie semble vraiment minuscule, et il doit certainement en être de même pour la caméra, peut-être invisible pour des yeux valides.
Sa cogitation terminée, Murdock entend les pas lents et réguliers d'une personne qui s'approche en face de lui, en direction de la grille. Il ne tarde pas à entendre la voix mielleuse d'un majordome l'interpeller :

- Bonjour, monsieur. Pourriez-vous me dire votre nom ?

- Je suis Matthew Murdock, procureur du tribunal de Manhattan. J'ai rendez-vous avec le maître des lieux.

- Effectivement. Veuillez me suivre.

L'homme ouvre la grille, puis guide Matt jusq'à la porte du manoir, puis à travers quelques pièces, avant de lui annoncer :

- Vous voici au Grand Salon, monsieur Murdock. Installez-vous, je vous prie. Mon maître ne saurait plus tarder.

"Bonjour. Vous êtes le nouveau proc'?"

La voix du maître des lieux est nonchalante, peut être même un brin méprisante. L'aveugle se demande même si il a daigné le regarder. Matt Murdock baisse doucement la tête, et avec un sourire d'amusement feint, répond à l'inconnu :

- Oui, je suis le nouveau procureur, Matt Murdock.

*Son coeur est calme, et son pas lent. Il est sûr de lui. A déraison, j'espère, mais voilà pour mon deuxième mauvais signe.*

- De manière générale, la visite d'un officier de justice chez soi n'est pas de meilleure augure. Mais je tiens à vous rassurer ; Je représente ici l'enquête, et non la loi. Je suis venu parler, et non juger.

Murdock a perdu son sourire, mais n'est pas menaçant non plus. Se"s deux mains posées sur sa canne, il se tient droit. Et avant que son interlocuteur ne puisse réagir, le procureur lance subitement une question :

- Mais au fait, comment dois-je vous appeler ?

Les dés étaient jetés. Chaque joueur ayant ses atouts en main, chacun pourrait infleuncer la justice ou les paris, dans cette lutte tranquille et hostile.

*Il aime jouer sur les mots... Rentrons donc dans son jeu, histoire de lui montrer que je ne plaisante pas.*

- C'est vrai que je suis arrivé ici, et que je suis comme je suis, grâce à l'enseignement de plusieurs maîtres, et je ne vois personne au-dessus de moi, hormis ces personnes. La liberté est le don de tout un chacun, et pas le monopole d'un être unique. Je trahirais donc un principe, que dis-je, une loi sacrée en vous donnant un qualificatif universel. Je crois que Monsieur suffira.

*La couleur est annoncée. Je suis ton hôte, pourquoi tu ne me proposes pas de m'asseoir ?*

Un sourire impénétrable ride le visage rigide de Matt Murdock. Il ne voit pas le maître des lieux, ne peut savoir son véritable nom, mais sait qu'il parviendra tôt ou tard à le dénuder. De gré, ou non.

- Venons-en au fait.

Le procureur fait une pause, afin de créer le suspense et la tension nécessaires à l'éloquence de son récit. Puis il commençe :

- Il y a trois semaines, Orson Grant, comptable pour une agence de fonds locale, était porté disparu. La société pour laquelle il travaillait avait du jour au lendemain fait faillite, perdant ses capitaux. Elle a cherché à le poursuivre pour abus de confiance, sûr que les investissements "perdus" par Grant, n'étaient pas aussi égarés que ça. Ce fut donc un deuxième motif qui poussa la police à le chercher. Et elle le trouva. Dans une chambre d'hôtel miteuse du Queens. Pendu.

Une nouvelle pause. Matthew entend quelqu'un se déplacer dans le Grand Salon. Le majordome ? Possible, mais ce n'est pas un moment pour identifier les signatures cardiaques.

- La police n'a rien retrouvé chez lui de valable, ni adresse, nom ou numéro, qui aurait permis de trouver les fonds détournés. A ma demande toutefois, ce qui avait été retrouvé sur Grant m'avait été apporté : Deux mouchoirs, quelques cents, et un papier froissé portant la mention "C.D.". Contrairement à ce qu'on aurait pu croire, Grant n'avait laissé aucun message dans les CD qui lui appartenaient, gravés légalement ou non. L'inspecteur chargé de l'enquête avait déjà effectué cette recherche.

Malgré sa condition d'aveugle, Murdock semble regarder son interlocuteur droit dans les yeux.

- J'ai tout de même exigé qu'une annonce paraisse dans la presse, quant à ces curieuses initiales. Trois jours plus tard, j'ai reçu votre invitation.

*La balle est dans ton camp. Essaye donc de la repousser.*

- Gardez pour vous ce genre de calembours sinistres, je vous prie.

Matt entend l'inconnu s'asseoir. Ce mauvais jeu de mots au sujet de la pendaison a chauffé ses veines et son coeur. Cet homme se joue de la mort, et accorde peu d'importance aux paroles d'un représentant de justice. Voilà un ennemi.

- Si vous n'en savez pas plus que moi quant à Grant, que pouvez-vous me dire sur les initiales ?

Il faut qu'il réponde. Un homme de ce rang ne peut se permettre d'avoir un procureur comme ennemi, un procureur dont il se joue.

*Peut-être effectivement qu'il ne sait rien sur Grant. Mais quand j'ai parlé de l'annonce dans le journal, j'ai perçu une brève, mais significative augmentation de son ryhtme cardiaque. Il est temps pour lui d'abattre ses cartes. Si il m'a fait venir ici, c'est qu'il a quelque chose à jouer.*

*Voilà des pistes. Et au moins, j'ai matière à enquêter.*

- Merci pour ces informations, Monsieur. J'aurai de nouvelles conjectures à étudier, grâce à vous.

Murdock ne s'attend pas à tirer autre chose de son hôte. Il s'est montré bien assez ambïgu depuis le début, et les propos qu'il tient demeurent assez étranges. Avec un sourire poli, le procureur de Manhattan tend la main vers celui que tant d'hommes de l'ombre connaissent en tant qu'Arcade.

Le procureur Murdock serra la main d'Arcade, et quitta l'inquiétant manoir sans demander son reste. Perdu dans ses pensées, il avait oublié d'analyser encore la signature cardiaque de ce curieux et troublant contact. Il ne pouvait s'empêcher de croire qu'il avait manqué quelque chose, et même s'il disposait de pistes, l'affaire lui semblait encore plus sombre à présent.

*Le Culte des Damnés... Une simple affaire de détournement de fonds bascule dans le fait divers occulte... Je ne lâcherai pas. Et m'est avais que j'aurai encore affaire à ce curieux personnage.*

Le soir était tombé. Il faisait un peu froid, mais l'odorat surdéveloppé de Matt percevait les différents pollens et les belles fragrances qui se mêlaient loin de la ville.

*C.D... Ca veut dire Carpe Diem, aussi.*

Et sur cette pensée, Murdock s'en retourna vers la ville.